Douleur et inconfort induits par les soins
Les soins sont-ils douloureux et source d'inconfort chez l'enfant et l'adulte avec PC ?
- Montant alloué : 36 500 €
- Financé en : 2015
- Statut : Clôturé
Nom du projet
Douleur et inconfort induits par les soins au sein des établissements accueillant des enfants et adultes avec PC
L'équipe
Ce projet de recherche a été mené par Amandine DUBOIS, docteur en psychologie et maître de conférence en psychologie du développement à l’Université de Bretagne Ouest. Il associe le service de Médecine Physique et de Réadaptation, le service de Pédiatrie et le Centre d’évaluation et de traitement de la douleur du CHU de Brest, ainsi que les structures sanitaires et sociales de quatre départements bretons (Côtes d’Armor, Finistère, Ille-et-Vilaine, Morbihan). Il bénéficie du soutien méthodologique du CNRD (Centre National de Ressources de lutte contre la Douleur).
À retenir
– L’association d’un handicap physique responsable de douleurs chroniques, d’un handicap cognitif limitant les possibilités de communication et la répétition de soins et gestes de rééducation potentiellement douloureux expose les patients avec PC à un risque élevé de douleurs induites.
– L’objectif principal du projet DIS-PC est d’identifier quantitativement et qualitativement les gestes douloureux et/ou inconfortables réalisés au quotidien chez des enfants et adultes ayant une PC, pris en charge dans un établissement sanitaire ou médico-social de Bretagne. L’ensemble des gestes réalisés sont colligés pendant 5 jours et 1 nuit, et la douleur évaluée par le soignant à l’aide d’une échelle d’évaluation adaptée (FLACC).
– Réalisée dans 16 établissements de Bretagne (101 enfants et 92 adultes avec PC) cette étude montre que plus d’un enfant sur 2 a fait l’objet d’un contact physique douloureux pendant le temps de recueil. Des gestes du quotidien ont parfois été douloureux (dont l’aide au repas, la verticalisation), ainsi que certains gestes de rééducation (dont les mobilisations, les massages) et soins infirmiers (les gestes invasifs, les prélèvements et injections). Les enfants en âge pré-scolaire et les adultes avec une atteinte motrice sévère sont les plus vulnérables face à la douleur. Enfin, peu de moyens de prévention de la douleur sont utilisés dans les établissements. La prise en charge de la douleur semble encore insuffisante, notamment concernant son évaluation et sa prévention.
L’association d’un handicap physique responsable de douleurs chroniques, d’un handicap cognitif limitant les possibilités de communication, et la répétition de soins et gestes de rééducation potentiellement douloureux expose les patients avec PC à un risque élevé de douleurs induites au sein des institutions. Ces douleurs difficilement repérables sont par conséquent peu évaluées et sous-traitées.
A l’heure actuelle, peu de données existent concernant la prévalence et les conditions de survenue précises de ces douleurs selon les caractéristiques cliniques des patients (enfants, adultes, sévérité du handicap), les types de gestes et la nature de l’admission institutionnelle (sanitaire ou médico-sociale).
Le projet DIS-HANDI est d’identifier quantitativement et qualitativement les gestes douloureux et/ou inconfortables réalisés au quotidien chez des enfants et adultes en situation de handicap pris en charge dans un établissement sanitaire ou médico-social de Bretagne [Soins de Suite et de Réadaptation (SSR), Institut Médico-Educatif (IME), Institut d’Education Motrice (IEM), Foyer d’Accueil Médicalisé (FAM), Maison d’Accueil Spécialisé (MAS), dans quatre départements]. Les objectifs secondaires sont d’identifier les facteurs de risque de douleur induite liés au geste douloureux et aux caractéristiques du patient, ainsi que de créer un outil simple d’évaluation continue hebdomadaire de la douleur en routine clinique.
L’étude DIS-PC fait partie de ce projet et s’attache plus particulièrement aux enfants et adultes avec PC. Il est prévu d’inclure dans DIS-PC 340 enfants et adultes avec PC.
L’ensemble des gestes réalisés auprès d’enfants et adultes admis en institution sont colligés pendant cinq jours et une nuit. La liste des 32 gestes représentatifs de l’activité multidisciplinaire des services répartis en 8 catégories (soins infirmiers, soins de nursing, soins de kinésithérapie, d’orthophonie, d’ergothérapie et psychomotricité, activité physique adaptée, soins autres) ont été définis lors une étude pilote. Les caractéristiques cliniques et démographiques des patients et l’intensité de la douleur provoquée par le geste sont évalués par le professionnel (échelle d’hétéroévaluation FLACC-r) ou le patient lui-même (échelle visuelle analogique EVA).
L'étude a été réalisée dans 26 établissements (16 établissements pédiatriques et 10 établissements adultes) répartis sur l'ensemble du territoire breton auprès de 446 patients au total (280 enfants dont 101 avec PC et 165 adultes dont 92 avec PC).
Etude pédiatrique :
101 enfants avec PC d’âge moyen 12 ans ont été inclus dans l’étude. 2561 gestes ont été recueillis et analysés. Les résultats montrent que 8% des gestes évalués ont provoqué une douleur et que 54% des enfants ont eu au moins un geste douloureux durant le temps de recueil. Les gestes qui ont provoqué le plus souvent une douleur sont des soins du quotidien de nursing : aide au repas (19%), verticalisation (14%), des soins de kinésithérapie tels que les mobilisations passive/étirements (16%), les massages (14%) et mobilisations globales sur table (13%), la fabrication appareillage (13%), les séances de sport adaptés (15%), et des soins infirmiers tels que les gestes invasifs respiratoires, et les prélèvements et injections (13%).
Sur la totalité des gestes, 25% des gestes étaient associés à une prévention de la douleur lors de leur réalisation (75% ont été réalisés sans moyen préventif). Parmi les moyens de prévention utilisés, les deux principaux étaient la distraction (73%) puis le recours au paracétamol (13%).
Etude adulte :
Une certaine réticence a été observée quant à la thématique de la douleur induite et à l’investissement des équipes soignantes dans ce projet de recherche. Le nombre de sujets nécessaire n’a donc pas été atteint malgré les efforts répétés de recrutement. 10 établissements ont participé à l’étude (5 SSR, 2 MAS, 3 FAM). Au total, 92 adultes d’âge moyen 56 ans ont été inclus
3218 gestes ont été recueillis et analysés. Les résultats montrent que 3 % de la totalité des gestes ont été jugés douloureux et 31% des adultes avec PC ont eu au moins un soin douloureux pendant la durée du recueil. Les gestes qui ont provoqué le plus souvent une douleur sont des soins infirmiers : les gestes invasifs anaux (16%), les soins de bouche et brossage de dents (9%), et les gestes invasifs respiratoires (8%).
Sur la totalité des gestes, 9% des gestes étaient associés à une prévention de la douleur lors de leur réalisation. Parmi les moyens de prévention utilisés, les principaux étaient le paracétamol (41%), la distraction (25%) puis le recours à la morphine (5%).
L’ensemble des résultats met en évidence une proportion non négligeable de douleurs induites par les soins au quotidien chez les enfants et adultes avec PC. Cette étude montre que tout soin ou geste impliquant un contact physique auprès d’un patient enfant ou adulte avec PC peut générer de la douleur, que ce soient des soins du quotidien, des soins infirmiers ou de rééducation.
Ces données montrent l’importance de poursuivre la sensibilisation de l’ensemble des professionnels qui gravitent autour d’enfants ou adultes avec PC concernant la question des douleurs induites par les soins et gestes du quotidien. Cette étude montre que les professionnels doivent prêter attention notamment à la réalisation de gestes dont certains sont pluri-quotidiens et source de douleurs (transfert, lavage, habillage/déshabillage, aide au repas, prélèvements, pansements, gestes invasifs, soins des yeux, mobilisations, verticalisation).
Bien que la douleur soit la comorbidité la plus rapportée chez les enfants et adultes avec PC, sa prise en charge semble encore insuffisante, notamment concernant son évaluation et sa prévention.
Pour aller plus loin
Gallien, P., Nicolas, B., Dauvergne, F., Pétrilli, S., Houedakor, J., Roy, D., & Duruflé, A. La douleur chez le sujet adulte infirme moteur cérébral. Annales de réadaptation et de médecine physique 2007; Vol. 50 : 558-563.
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Pain in children with cerebral palsy: a cross-sectional multicentre European study KN Parkinson, L Gibson, HO Dickinson, AF Colver. Acta Pædiatrica 2010 ; 99 : 446–451.
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Bourseul, J. S., Brochard, S., Houx, L., Pons, C., Bue, M., Manesse, I., Ropars J., Guyader D., Lemoine P., & Dubois, A. Care-related pain and discomfort in children with motor disabilities in rehabilitation centres. Ann Phys Rehabil Med. 2016; 59(5-6): 314-319.
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Dubois, A. (2020), « Etude de la douleur dans les troubles du développement. Intérêt d’une approche psychologique et développementale », in Muller, Laurent ; Laguette, Vanessa ; Dany, Lionel (dir.), Pratiques et interventions en psychologie de la santé., Editions des archives contemporaines, Coll. «Psychologie du social», France, ISBN : 9782813003744, pp. 79-92.
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Dubois A, Hall C, Courtois-Communier E, Brasseur A, Cacioppo M, Brochard S. Incidence and risk factors for care-related pain in children with physical disabilities. Eur J Phys Rehabil Med 2023; 59:414-24. DOI: 10.23736/S1973-9087.23.07726-2.
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